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Varices et gastropathie d'hypertension portale

code CISP-2 : D14 ; D84

code CIM-10 : I85 ; I86.4 ; K76.6

En résumé

résumé
  • L'hypertension portale (HTP) est généralement causée par une cirrhose (alcoolique, causée par une hépatite virale chronique B ou C, métabolique...).

  • L'HTP peut se manifester par l'apparition de varices, notamment œsophagiennes, et d'une gastropathie dite "d'hypertension portale".

  • Le risque des varices est la rupture entraînant une hémorragie aiguë parfois massive.

  • Leur dépistage par endoscopie œso-gastro-duodénale (EOGD) est donc indiqué chez la majorité des patients dont on diagnostique une cirrhose.

  • Un traitement prophylactique des hémorragies digestives est parfois nécessaire en prévention primaire et systématique en prévention des récidives (prévention secondaire). Il fait en général appel aux bêtabloquants non cardiosélectifs et à la ligature élastique des varices œsophagiennes.

  • Une hémorragie digestive possiblement liée à l'hypertension portale doit être prise en charge en urgence, en soins intensifs. Un traitement vasoactif et une antibioprophylaxie doivent être débutés précocement. Une EOGD à visées diagnostique et thérapeutique doit être réalisée dans les 12 heures.

  • Une gastropathie d'hypertension portale entraîne rarement une hémorragie aiguë mais plutôt chronique avec le risque de développer une anémie chronique.

Stratégie de prise en charge

prise en charge

L'hypertension portale est ​une augmentation pathologique de la pression du réseau veineux porte. 

La cirrhose en est la principale cause dans les pays industrialisés. Elle-même causée le plus souvent par une consommation excessive d'alcool, une hépatite virale chronique B ou C ou une stéatohépatite métabolique (NASH).

Le principal risque de l'hypertension portale est l'hémorragie digestive aiguë par rupture de varices.

Les varices sont le plus souvent œsophagiennes mais peuvent aussi être gastriques ou ectopiques (duodénales, rectales...).

La gastropathie d'hypertension portale, quant à elle, entraîne rarement une hémorragie aiguë mais plutôt chronique avec développement d'une anémie chronique.

PRÉVENTION PRIMAIRE : STRATÉGIE DE PRISE EN CHARGE D'UN PATIENT CIRRHOTIQUE AVANT LA SURVENUE DE TOUT ÉPISODE HÉMORRAGIQUE

prévention primaire d'un épisode hémorragique chez le patient cirrhotique

(1) Une endoscopie œso-gastro-duodénale (EOGD) doit systématiquement être réalisée lors de la prise en charge initiale d'un patient cirrhotique, en cas de cirrhose décompensée.

En cas de cirrhose compensée, avec une élasticité hépatique inférieure à 20 kPa et un taux de plaquettes supérieur à 150 000/mm3, le risque pour le patient d'avoir des varices nécessitant un traitement est très faible. Ainsi, l'EOGD de dépistage peut être évitée et une simple surveillance annuelle de l'élasticité hépatique et du taux de plaquettes est recommandée. Cependant, en cas d'augmentation de l'élasticité hépatique ou de diminution du taux de plaquettes, une EOGD devra être réalisée.

(2) VO de grade I : petites varices, de taille < 5 mm, s'effaçant à l'insufflation ;

VO de grade II : grosses varices, de taille > 5 mm, ne s'effaçant pas à l’insufflation et non confluentes ;

VO de grade III : grosses varices, de taille > 5 mm, ne s'effaçant pas à l’insufflation et confluentes.

(3) Traitement étiologique de l'hépatopathie : par exemple sevrage en alcool (recommandé quelque soit la cause), éradication virale en cas de cirrhose secondaire à une hépatite virale, mesures hygiéno-diététiques en cas de stéatohépatite non alcoolique (NASH)...

(4) Traitement par bêtabloquant non cardiosélectif : propranolol  AMM / nadolol Hors AMM / carvédilol Hors AMM

S'assurer de l'absence de contre-indication et réaliser une surveillance régulière du traitement.

Objectif : dose efficace pour une réduction de 25% de la fréquence cardiaque autour de 55/min avec une bonne tolérance.

(5) Maladie causale contrôlée : par exemple sevrage en alcool en cas de cirrhose alcoolique, éradication virale en cas de cirrhose secondaire à une hépatite virale.

Comorbidités : obésité, diabète, cancer, ostéoporose, pathologie pulmonaire, pathologie rénale, pathologie cardiovasculaire.

NB : En cas de varices gastriques : prise en charge non consensuelle (possible prophylaxie par bêtabloquant non cardiosélectif, étude suggérant l'injection de cyanoacrylate...) 

PRISE EN CHARGE D'UNE HÉMORRAGIE DIGESTIVE LIÉE À L'HYPERTENSION PORTALE (PHASE AIGUË)

Plusieurs causes de saignement digestif du à l'hypertension portale

  • par rupture de varices : œsophagiennes +++, parfois gastriques ou ectopiques

    • hématémèse et/ou méléna voire rectorragies en cas d'hémorragie abondante ;​

    • pâleur cutanée et muqueuse ;

    • tachycardie (pouvant être masquée par la prise de bêtabloquants)

    • hypotension voire état de choc en cas d'hémorragie massive

  • par gastropathie d'hypertension portale

    • rarement en cause dans des hémorragies aiguës ;

    • plutôt responsable de saignements chroniques conduisant à une anémie chronique.

Mesures générales

  • Prise en charge spécialisée urgente en unité de soins intensifs ou de réanimation

  • Remplissage vasculaire en cas d'instabilité hémodynamique ; objectif de maintien de la pression artérielle moyenne autour de 65 mmHg

  • Transfusion de culots globulaires si nécessaire (taux d'hémoglobine cible = 7-8 g/dL ; objectif plus élevé en cas de comorbidités (notamment coronariennes) ou de signes de mauvaise tolérance de l'anémie).

  • Au cours d’une hémorragie digestive chez un patient cirrhotique, il n’y a probablement pas d’indication à l’administration de plasma frais congelé dans l’objectif de corriger une coagulopathie ou avant de réaliser l'endoscopie.

Traitement vasoactif

Antibioprophylaxie

  • Systématique chez tout patient cirrhotique présentant une hémorragie digestive haute

  • À administrer le plus précocement possible, pour une durée de 5 à 7 jours

  • Antibiothérapie par :

    • Fluoroquinolone : per os ou IV quand la voie orale n'est pas possible ;

    • OU Céphalosporine de troisième génération (ceftriaxone IV), à préférer chez les patients atteints de cirrhose avancée (Child-Pugh B ou C), chez ceux traités par norfloxacine au long cours ou chez les patients hospitalisés fréquemment chez qui le risque de résistance au fluoroquinolone est élevé.

Endoscopie œso-gastro-duodénale (EOGD) en urgence

  • EOGD à réaliser dès que possible et de toute façon dans les 12 heures suivant le début des symptômes ;

  • Chez un patient stabilisé sur le plan hémodynamique, intubé-ventilé si la situation l'exige.

  • Après préparation : utilisation d'accélérateurs de la vidange gastrique (ERYTHROMYCINE 250mg IV sur 30min, 30 à 120min avant l'endoscopie, en absence de contre-indication (notamment allergie aux macrolides, certaines interactions médicamenteuses, allongement du QT...) ; alternative : lavage gastrique par sonde naso-gastrique 
  • À visée diagnostique : visualisation d'une hémorragie active ou d'un clou plaquettaire adhérent à la varice œsophagienne témoignant d'une hémorragie récente ;
  • À visée thérapeutique :
    • geste endoscopique d'hémostase (ligature élastique des varices œsophagiennes, obturation à la colle pour les varices gastriques ou ectopiques) ;
    • en cas d'échec : sonde de tamponnement œsophagien (sonde de Blakemore) ou prothèse œsophagienne métallique couverte ou mise en place en urgence d'un TIPS (Transjugular Intrahepatic Portosystemic Shunt).

Pose d'un shunt portocave intrahépatique par voie transjugulaire ou

"TIPS" (Transjugular Intrahepatic Portosystemic Shunt)

  • À considérer dans les 72 heures (idéalement dans les 24 heures) chez certains patients :

    • ceux ayant une cirrhose Child-Pugh B avec persistance d'un saignement actif malgré les traitements médicamenteux et endoscopique initiaux

    • ceux ayant une cirrhose Child-Pugh C.

  • À discuter en cas d’échec du traitement hémostatique initial (médicamenteux et endoscopique).

IPP non nécessaires

  • Chez l’adulte, il ne faut pas mettre en route ou poursuivre un traitement par inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) lorsque l’EOGD a confirmé le diagnostic de rupture de varices œsophagiennes ou gastriques

PRÉVENTION DES RÉCIDIVES D'HÉMORRAGIES DIGESTIVES LIÉES À L'HYPERTENSION PORTALE (PRÉVENTION SECONDAIRE)

Chez les malades ayant déjà eu une hémorragie digestive liée à l'hypertension portale :

  • causée par la rupture de varices œsophagiennes :

    • traitement de référence : double prophylaxie par bêtabloquant non cardiosélectif + ligature élastique des varices ;

    • bêtabloquant non cardiosélectif en monothérapie chez les patients ne pouvant pas ou n’acceptant pas un traitement endoscopique par ligature ;

    • traitement par ligature seul proposé en cas de contre-indication au traitement par bêtabloquant.

    • en cas de récidive hémorragique malgré double propylaxie bien menée : envisager la pose d'un TIPS.

  • causée par la rupture de varices gastriques : (prise en charge peu consensuelle)

    • obturation à la colle 

    • ou bêtabloquant non cardiosélectif

    • ou TIPS

  • causée par une gastropathie d'hypertension portale :

    • traitement de référence : bêtabloquant non cardiosélectif ;

    • si échec et patient "transfusion-dépendant" : envisager la pose d'un TIPS.

NB :

  • Bêtabloquants non cardiosélectifs :

  • À instaurer en relais du traitement vasoactif administré à la phase initiale

  • S'assurer de l'absence de contre-indication et réaliser une surveillance régulière du traitement.

  • Objectif : dose efficace pour une réduction de 25% de la fréquence cardiaque autour de 55/min avec une bonne tolérance.

Sources

sources

Collégiale des universitaires en hépato-gastro-entérologie. Hépato-gastro-entérologie-Chirurgie digestive 4e ed. Elsevier Masson 2018. p.195–212

Actualisation de la page

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Date de création : 23/05/2020

Date de dernière mise à jour : 23/05/2020

Date de dernière révision : 23/05/2020

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